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>> Le vent
catabatique en Terre Adélie << |
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D’après une étude de Paul Pettré (Université Paul
Sabatier de Toulouse et CNRM Météo-France) publiée
en 1995. |
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Définition :
Les glossaires de météorologie, tout comme le
dictionnaire Larousse, définissent les vents
catabatiques comme des vents soufflant dans le sens
de la pente descendante, généralement associés à de
l’air froid (de type vent de gravité comme le
« Bora » issu d’Europe Centrale et qui touche
l’Adriatique), provenant du centre d’un plateau ou
sommet froid et se dirigeant donc vers la
périphérie.
Dans le cas du continent Antarctique, le vent
catabatique est celui créé par la pellicule d’air
très froid au-dessus du plateau continental
(altitude 2 500-3 500 m) s’écoulant en direction des
côtes et de l’Océan glacial. Ce vent de pente, par
sa fréquence et sa force, détermine largement le
climat local des régions qui le subissent
régulièrement.
Parfois, cet écoulement naturel de l’air froid
vers le bas d’une pente souffle en tempête
dévastatrice, atteignant des forces d’ouragan en
bordure côtière. C’est le cas de certains épisodes
observés à Dumont d’Urville, avec des vitesses de
vent instantané dépassant allègrement 180/200, voire
250 km/h. |
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Episode de
vent catabatique sur le continent et la banquise, Terre Adélie
© Samuel Blanc |
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Climatologie locale :
L’étude de la climatologie du vent à Dumont
d’Urville montre que les épisodes de vent fort liés
aux phénomènes catabatiques sont plus fréquents
durant les inter-saisons (mars-avril et
septembre-octobre). Cette variation saisonnière
laisse à penser que le forçage des vents
catabatiques résulte de mécanismes de grande
échelle, influencés par la circulation générale et
circumpolaire notamment, lors des changements de
saisons. La direction privilégiée de l’origine de
cet écoulement s’étend sur tout le secteur Sud-Est à
Sud. On peut concevoir aisément que lorsque la
circulation générale permet également un flux de
basses couches de cette direction, les
déclenchements de vent catabatique s’en trouvent
favorisés. C’est notamment le cas après le passage
de dépressions au nord de la Terre-Adélie, lorsque
les courants de basse et moyenne altitude
s’orientent au secteur Sud-Est ou Sud. |
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Phénomène de Loewe :
Portant le nom de son « découvreur », ce phénomène se
produit fréquemment durant, ou à la fin, des épisodes
catabatiques. Un observateur fixe voit le vent tomber de
manière soudaine, parfois en moins d’une minute, de la
force d’un ouragan au calme plat, et parfois revenir peu
de temps après, tout aussi brusquement, à sa vitesse
précédente. Ce phénomène, particulièrement
spectaculaire, s’accompagne généralement de changements
brutaux dans la pression atmosphérique (en hausse
rapide), et au niveau de la température de l’air (en
hausse également).
L’australien Ball (1956) en a proposé une explication,
toujours valide de nos jours, qui repose sur l’analogie
entre les écoulements catabatiques et les écoulements
d’eau dans les canaux. Une discontinuité de l’écoulement
(saut hydraulique) est parfois observée sous certaines
conditions :
-
en
amont du saut, la couche d’air froid est peu épaisse
(100/500 m) et sa vitesse élevée (écoulement de type
torrentiel du « catabatique »).
- en aval du saut, la couche est épaisse (>1 500 m) et
la vitesse faible (écoulement de type fluvial).
La discontinuité ainsi produite est de dimension
horizontale très faible, elle est donc de durée faible,
l’amplitude du phénomène étant proportionnelle à la
variation d’épaisseur de l’air froid.
Quant au « saut de pression », en voici une
explication : l’écoulement catabatique est un état
considéré comme perturbé de l’atmosphère dans lequel la
pression en surface est réduite par rapport à ce qu’elle
serait dans un état non perturbé. Celui-ci est
précisément rétabli par la survenance du phénomène de
Loewe, qui ramène des conditions normales de pression. |
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Vent extrême du 16 juin
1972 à Dumont d’Urville :
On l’aura compris, les épisodes de vent
catabatique sont une constante du climat de la côte
de Terre-Adélie, et il n’est pas un mois dans
l’année où il n’a pas été enregistré au moins une
rafale à 170 km/h, et ce depuis 1956, date des
premières mesures de vent sur le site. La valeur de
200 km/h a d’ailleurs été relevée environ 50 fois
depuis cette date …
Mais le record appartient à cette journée du 16
juin 1972, où l’anémomètre de la station a permis de
dépasser les valeurs extrêmes prévues sur les
diagrammes alors utilisés à l’époque (voir diagramme
ci-dessous). La pointe maximale a été estimée à
88/89 m/s ou 320 km/h vers 17h30, peu après
l’occurrence d’un phénomène de Loewe
particulièrement spectaculaire.
Cette valeur de vent en surface semble
d’ailleurs constituer le
record mondial de vent fort
mesuré par une station météorologique proche du
niveau de la mer. Seuls des vents mesurés en haute
montagne, et ceux mesurés par sondes à l’intérieur
de tornades particulièrement violentes aux USA
dépassent cette valeur. |
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Enregistrement du vent instantané le 16 jun 1972 |
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